Le dimanche gras, 13 février 1820, le soir vers dix heures, le duc de Berry, neveu de Louis XVIII et héritier présomptif au trône de France, se trouvant à l'Opéra, venait de reconduire à sa voiture son épouse un peu souffrante (en raison de son état : elle était enceinte), lorsqu'un passant lui enfonça une longue tige de fer sous le sein droit. Le duc expira son dernier soupir à cinq heures, dans une des suites de l'Opéra, après avoir encore demandé à la dernière minute la grâce de son assassin, l'ouvrier-sellier Louvel. Celui-ci, un fanatique, avait frappé le duc de Berry pour, disait-il, anéantir en lui la "race" des Bourbons.
La duchesse de Berry mettait au monde, quelques mois plus tard, un fils qui reçut le titre de duc de Bordeaux, puis prendra, plus tard, celui de comte de Chambord (29 septembre 1820).
Le crime de l'ouvrier Louvel prépara le retour de l'extrême-droite royaliste au pouvoir. Les Ultras, dans leur propagande, répétaient partout que "le poignard qui avait frappé le duc de Berry était une idée libérale", et l'un d'eux, le député Claussel de Cassergues, à la Chambre, proposa, au lendemain de l'attentat, la mise en accusation du Premier ministre Elie Decazes comme complice.
Le propre frère du Roi, le comte d'Artois (futur Charles X), supplia ce dernier de renvoyer son ministre. Mais Louis XVIII refusa : "Sa politique est mienne", disait-il. Pour apaiser la situation, toutefois, Decazes offrit sa démission et Louis XVIII, à contre-coeur, se résigna à l'accepter. Seulement il s'empressa de le nommer duc de Glücksberg et lui donna l'ambassade de France à Londres.
Jusqu'à la fin de 1824, pendant les quatre dernières années du règne de Louis XVIII, les successeurs d'Elie Decazes, que furent le duc de Richelieu, puis Villèle, se bornèrent à déconstruire l'oeuvre libérale de leur prédécesseur.
Richelieu, qui remplaça directement Descazes, fit tout d'abord modifier la loi sur la presse et rétablir la censure (31 mars 1820). Puis il fit adopter la loi électorale, dite du "double vote", le 30 juin 1820. Dont le vote ne fut d'ailleurs pas obtenu sans peine : il y eut dans Paris des commencements d'émeutes. A la Chambre, les débats se prolongèrent pendant un mois. Le principe du double-vote fut combattu avec fougue par trois députés libéraux, l'avocat Royer-Collard, le général Foy et l'ouvrier Jaques-Antoine Manuel ; il ne passa finalement qu'à 5 voix de majorité.
Cette loi, qui faisait élire deux cinquièmes des députés, par près de 18 000 grands propriétaires, donna tout ce qu'en espéraient ses auteurs : en trois ans, les libéraux furent presque complètement balayés à la Chambre.
Le duc de Richelieu ne voulait pas pousser le processus réactionnaire plus loin.
Les Ultras et leur chef de file, le comte d'Artois, ne trouvant plus de soutien dans un Roi malade et dont les facultés déclinaient de jour en jour, Richelieu donna sa démission le 12 décembre 1821.
Son successeur, Villèle, fit immédiatement voter deux lois contre la presse :
- la première rendait le jugement des délits de presse aux tribunaux correctionnels (6 février 1822) ;
- la seconde créait un nouveau délit : le délit d'opinion, qui permit de suspendre, voire de supprimer, tout journal dont le contenu était jugé subversif.
Le gouvernement pouvait ainsi, selon le mot de Royer-Collard, "atteindre comme dangereux ce qu'il ne pouvait poursuivre comme coupable."
Ce fut sous cette période que se formèrent des sociétés secrètes et où, par elles, furent organisés des complots terroristes dont le but était le renversement des Bourbons : à Sauveur (décembre 1821), à Belfort (janvier 1822), à Thouars (février 1822), avec le général Berton à Nantes, etc. tous déjoués, ils entrainèrent des condamnations à mort et des exécutions, notamment des quatre sergents du 45ème de Ligne en garnison à La Rochelle (2 septembre 1822).

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